Robert Arnauld d’Andilly, né en 1589 à Paris et mort à l'abbaye de Port-Royal des Champs le 27 septembre 16741, était un conseiller d’État, spécialiste des questions financières, proche de Marie de Médicis. Par l'élégance de sa langue, il figure parmi les grands poètes, écrivains et traducteurs du français classique au XVIIe siècle. Fervent catholique, il a joué un rôle important dans l'histoire du jansénisme, et fut l'un des Solitaires de Port-Royal des Champs. Passionné d'arboriculture, il s'est illustré également dans le développement de l'art de tailler les arbres fruitiers.
En 1652 paraît un livre intitulé La Manière de cultiver les arbres fruitiers, publié sous le nom d’Antoine Legendre, curé d’Hénonville. Bien que ce personnage existe réellement, l’ouvrage a été attribué dès 1677 à l’abbé de Pontchâteau, et ce n'est qu'en 1716 que le nom de Robert Arnauld d’Andilly fut proposé pour la première fois. Enfin, en 1725, l'ouvrage a été attribué à Guillaume de Lamoignon et à Olivier Le Fèvre d'Ormesson.
Le goût de Robert Arnauld d’Andilly pour les arbres fruitiers était notoire : Tallemant des Réaux se moquait des trois cent sortes de poires, pour la plupart immangeables, qu’il cultivait sur sa terre d’Andilly. Il se faisait surnommer le surintendant des jardins de Port-Royal. Au demeurant, il avait coutume d’envoyer des paniers de fruits de grande rareté et de grandes qualités à ses correspondantes.
La Manière de cultiver les arbres fruitiers est, avec le Jardinier françois de Nicolas de Bonnefons, sorti des presses l’année précédente, le premier livre de sylviculture publié au XVIIe siècle. Il inaugure une longue série d’ouvrages sur le sujet, dans lesquelles il sera fréquemment cité en référence, au moins jusqu’à la publication posthume de l’Instruction pour les jardins fruitiers et potagers de La Quintinie, en 1690.
La pratique de la sylviculture est généralement considérée comme une activité monastique, en raison des liens théologiques qui font du jardin terrestre une métaphore du jardin d'Éden. Robert Arnauld d'Andilly aurait dit lui-même, à propos de Port-Royal des Champs : « S'il y avait un paradis en terre, il serait hors de mon pouvoir d'imaginer qu'il fut ailleurs ». Elle s’inscrit également, dans l’entourage de Port-Royal des Champs, dans le contexte d’activité sylvicole en l’Île-de-France.
Mais dans La manière de cultiver les arbres fruitiers, elle apparaît comme une activité noble, licite pour un gentilhomme, en raison de ses liens avec la généalogie. Non seulement la métaphore de l’arbre généalogique, mais aussi le choix savant des greffons, la conduite et l’éducation des jeunes arbres, font écho aux valeurs nobiliaires du XVIIe siècle.
Les liens sont nombreux, jusque dans le vocabulaire employé, avec l’élevage des chevaux, activité noble par excellence. Enfin, la recherche de produits de qualité pour la table contribue à faire des fruits des éléments d’un savoir-vivre aristocratique.